Le Barreau du Cameroun est sous le feu des critiques pour son attitude jugée trop conciliante envers la Gendarmerie nationale, après que deux gendarmes ont torturé l’avocat défenseur des droits de l’homme, Me Tamfu Richard.
Le bâtonnier, Me Mbah Eric Mbah, accompagné des membres du Conseil de l’Ordre, a récemment rencontré la hiérarchie de la Gendarmerie à Yaoundé pour discuter des moyens d’améliorer la collaboration entre les deux institutions.
Ils ont convenu de mettre en place un espace de dialogue permanent afin d’éviter de futurs conflits entre avocats et gendarmes.
Cette rencontre intervient à peine une semaine après que deux gendarmes ont violemment agressé Me Tamfu Richard à Douala, le 27 novembre 2024.
L’avocat avait empêché les gendarmes d’arrêter son client sans mandat d’arrêt.
Promesse non tenue de la Gendarmerie
Suite à cet incident, la Gendarmerie avait promis d’enquêter sur cette torture et de publier les résultats dans un délai de 72 heures. Cependant, cette promesse n’a pas été respectée.
Mettre fin à l’impunité des gendarmes
Les avocats estiment que si la Gendarmerie nationale ne procède pas à l’arrestation des agresseurs de Me Tamfu comme promis, cela ne fera qu’encourager l’impunité.
Me Christian Ntimbane, avocat et militant de la société civile, reproche au Barreau du Cameroun de ne pas en faire assez pour exiger justice.
Il critique vivement le bâtonnier et son bureau exécutif, les accusant de « dîner avec l’oppresseur » au lieu de défendre les avocats et la dignité de la profession juridique. « Le Barreau n’a qu’une chose à faire : exiger l’arrestation et la comparution des gendarmes responsables de l’agression et du traitement dégradant et inhumain infligé à Me Richard Tamfu, devant le tribunal militaire, compétent pour juger les militaires ayant commis des crimes dans le cadre de leur mission », écrit Me Ntimbane.
Il poursuit : « À défaut, il faut décider de suspendre le travail des avocats pour une durée de 15 jours, renouvelable. Ce qui s’est passé est intolérable et ne peut être banalisé.
Un avocat torturé publiquement, sans aucune conséquence judiciaire, détruit l’estime sociale de la profession. Notre image est ternie, rabaissée aux yeux des citoyens que nous défendons.
Comment prétendre défendre les autres si nous sommes incapables de nous défendre nous-mêmes ?
Si un avocat avait agressé un policier, il serait déjà arrêté », conclut-il.
Toujours aucune arrestation
Il semblerait que la Gendarmerie nationale ne planifie pas d’établir la justice pour Me Tamfu Richard.
Cinq jours après la torture, Me Tamfu a clarifié que la Gendarmerie n’avait procédé à aucune arrestation liée au crime.
Huit jours après les faits, aucune mise à jour n’a été communiquée par la Gendarmerie sur l’enquête promise.
Plusieurs organisations de la société civile et figures politiques ont dénoncé cet acte et appelé à des sanctions.
Le Barreau du Cameroun a condamné l’agression et appelé à des enquêtes approfondies et à la justice.
Le 2 décembre, Human Rights Watch a déclaré : « Les autorités camerounaises doivent cesser de s’en prendre aux avocats et veiller à ce que l’enquête promise sur l’attaque contre Me Tamfu soit crédible, approfondie et impartiale, et que les responsables rendent des comptes. »
Cependant, il reste incertain qu’une justice soit rendue.
De précédents cas de brutalités policières et militaires au Cameroun sont restés impunis, et les enquêtes promises n’aboutissent que rarement.
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